Situation et défi initial
Avez-vous parfois l'impression de constamment Ă©teindre des feux, sans forcĂ©ment savoir si ce sont les feux les plus urgents et les plus importants que vous Ă©teignez ? Ou si Ă©teindre les feux est vraiment le plus important ? Un tel fonctionnement est certes gratifiant de par son aspect hĂ©roĂŻque, mais mĂšne vite Ă la fatigue et la frustration. Heureusement, il est possible de "sortir la tĂȘte du casque ignifuge" et de prendre de la hauteur grĂące aux approches Agiles, dont Kanban fait partie. DĂ©couvrez comment l'Ă©quipe du SystĂšme d'Information du Territoire (SIT) de la ville d'Yverdon-les-Bains en a tirĂ© parti pour amĂ©liorer l'organisation de son travail.
Kanban Ă la rescousse
La Méthode Kanban (du japonais "kanban" qui signifie "carte que l'on peut voir") a été développée chez Microsoft dans les années 2000, en s'inspirant notamment des systÚmes mis en place sur les chaßnes de production Toyota dans les années 60.
Kanban c'est un ensemble de principes, de valeurs et de pratiques visant Ă optimiser un flux de travail. Un flux de travail, mais pas n'importe lequel: on parle de "flux tirĂ©", et c'est dĂ©jĂ un grand changement de paradigme pour de nombreuses Ă©quipes. Lorsque l'on travaille Ă "flux tirĂ©", c'est l'Ă©quipe qui, lorsque de la capacitĂ© se libĂšre, âtireâ du lot de demandes en attente la demande la plus importante Ă ce moment-lĂ , au lieu que ce soit les parties prenantes qui "poussent" le travail dans le systĂšme de l'Ă©quipe, comme c'est souvent le cas !
Un autre pilier de la méthode Kanban est d'employer un systÚme visuel, afin d'apporter à tous la transparence totale sur l'état du systÚme et les rÚgles régissant le travail de l'équipe. Enfin, il est nécessaire de poser des limites sur la quantité de travail en parallÚle, quitte à les dépasser momentanément, mais en étant conscient que cela révÚle un dysfonctionnement du systÚme.
VoilĂ un programme bien ambitieux, me direz-vous. Les auteurs de la mĂ©thode en sont pleinement conscients et proposent, plutĂŽt qu'une transformation "big bang", de "partir de lĂ oĂč l'on est". C'est-Ă -dire de commencer avec le systĂšme actuel, tout imparfait soit-il, et de lancer un moteur d'amĂ©lioration continue Ă partir de lĂ . VoilĂ qui rend la tĂąche plus accessible et c'est dans cet Ă©tat d'esprit que j'ai rendu visite Ă l'Ă©quipe du SIT.
Ce qui a été mis en place
La premiĂšre Ă©tape a Ă©tĂ© de reprĂ©senter tous les Ă©tats du systĂšme actuel sous forme d'un tableau Kanban. Tous les Ă©tats, par exemple "Demande rĂ©ceptionnĂ©e", "Demande en traitement"... y compris les entre-deux pas trĂšs clairs dans lesquels une tĂąche peut se trouver coincĂ©e. Ăa vous rappelle quelque chose ?
L'étape suivante a été de poser une limite initiale sur les différents états intermédiaires de traitement d'une tùche. En effet, c'est un grand classique, travailler sur trop de choses en parallÚle (le fameux "Work In Progress" ou WIP) décroßt spectaculairement l'efficacité.
Ensuite, nous avons parlé de la façon dont les demandes sont formulées et avons abordé le format User Story, qui permet une compréhension commune du "pourquoi" entre le demandeur et l'équipe. Ainsi, il est possible d'effectuer une meilleure priorisation et des propositions de solutions souvent plus pertinentes que ce que le demandeur avait imaginé au départ.
Une fois ceci fait, nous avons documentĂ© et affichĂ© toutes les "rĂšgles du jeu" appliquĂ©es jusqu'ici tacitement par l'Ă©quipe dans le processus de traitement d'une demande. Par exemple, comment dĂ©finit-on la prioritĂ© ? Qu'est-ce qui fait objectivement qu'une demande est prĂȘte pour implĂ©mentation ou qu'elle a bien Ă©tĂ© traitĂ©e ?
Jusqu'ici, un travail somme toute assez scolaire. La toute derniĂšre Ă©tape a Ă©tĂ© de lancer ce qui fera le succĂšs ou non de cette transformation. Il s'agit du moteur d'amĂ©lioration continue, bien connu dans le monde Agile. Pour cela, on planifie des sĂ©ances rĂ©currentes dites de "rĂ©trospectives", oĂč l'Ă©quipe se rĂ©unit pour dĂ©briefer honnĂȘtement sur son fonctionnement pendant une pĂ©riode donnĂ©e. De ce moment d'introspection (mais pas d'autocritique) on tire une ou deux amĂ©liorations Ă apporter au systĂšme: par exemple, adapter la limite de travail en cours sur tel Ă©tat ou ajouter un nouvel Ă©tat intermĂ©diaire. L'expĂ©rience des semaines suivantes dira si cette adaptation Ă©tait pertinente. Et ainsi de suite. Ainsi, le systĂšme reste au service de la rĂ©alitĂ© et non l'inverse. Ă noter qu'il est indispensable de collecter des retours de la part de ceux Ă qui bĂ©nĂ©ficient les travaux rĂ©alisĂ©s en tout temps !
Le résultat aprÚs un mois
Petit à petit les résultats se font ressentir. Les demandes sont mieux structurées, grùce au formalisme apporté par les User Story. La visualisation sous forme de tableau offre une vue d'ensemble des demandes, et apporte la transparence aux parties prenantes extérieures à l'équipe. Rendre visible l'avancement du travail est également une source de motivation. Enfin, les étapes explicites qui précédent l'implémentation (analyse et validation par le demandeur) assurent qu'un accord sur le travail à faire a été atteint.
Une amélioration continue
Suite à la premiÚre rétrospective, les actions concrÚtes sont prises pour faciliter la saisie de demandes pour les utilisateurs du SIT, ainsi que pour rendre plus aisé la consultation par tous du tableau Kanban et des rÚgles de fonctionnement. Lorsque ces derniÚres sont enfreintes, l'équipe s'engage à documenter les cas afin de décider des adaptations les plus pertinentes. Le tableau physique est remplacé par un équivalent numérique afin de s'adapter au travail à distance.
La collaboration avec Liip
Au départ une collaboration purement technique, les échanges entre le SIT et Liip ont suscité une réflexion particuliÚrement enrichissante autour de l'organisation du travail dans un contexte de changement permanent.
La capacité de Liip à comprendre le contexte d'intervention et ses spécificités s'est révélée un atout déterminant dans la réussite de cette mission.